Mon fils est un X-men

C’est l’une de mes sœurs qui a trouvé ce terme pour qualifier la maladie de MiniLeg0 et je l’affectionne particulièrement. Non pas parce que j’aimerais que mon fils devienne un loup solitaire bourru avec une coupe de cheveux en W et des griffes qui lui sortent des jointures, ça non. Mais parce qu’à travers ces mots, cette injustice de la vie devenait un super pouvoir, faisant de MiniLeg0 ce qu’il est réellement, un héros.

Si vous allez lu l’article concernant ma grossesse vous savez que la venue au monde de MiniLeg0 a été très compliquée, nous avons tous les deux failli y laisser nos vies. Deux ans après cette expérience traumatisante, nous ne nous attendions pas à vivre un nouveau coup du sort.

Une nouvelle épreuve

MiniLeg0 était âgé d’un peu plus d’1 an et demi lorsque sa nounou nous a alerté sur la forme un peu arquée de ses jambes. Il avait commencé à marcher à 15 mois mais nous ne nous étions jamais alerté à ce sujet. Suite aux retours de la nounou, nous avons décidé de consulter nôtre pédiatre. Cette dernière nous a répondu que c’était normal pour un enfant de son âge qui vient d’apprendre la marche, que ça s’atténuerait avec la croissance.

Quelques mois plus tard, nous avons consulté notre médecin traitant car MiniLeg0 avait un rhume. En l’auscultant elle s’est attardée sur ses poignets, puis elle a regardé ses jambes. Elle nous a fait remarquer que ses jambes étaient arquées et les os de ses poignets légèrement proéminents. Elle nous a conseillé de faire des bilans sanguins, une radio de ses jambes et de consulter une pédiatre spécialisée au CHU de Nantes.

Le jour de la convocation au CHU pour les résultats des différents tests, nous avions la boule au ventre à l’idée qu’on nous annonce une mauvaise nouvelle. Et là le diagnostic tombe : MiniLeg0 souffre de rachitisme vitamino-résistant, une maladie qui affecte les os provoquant des déformations au niveau des jambes.

Après ce coup de massue, nos questions fusent : En souffre-t-il ? Y a-t-il un traitement ? Va-t-il grandir normalement ? Est-ce qu’il pourra marcher, courir, faire du vélo comme tous les enfants ?

Le médecin nous explique que des douleurs osseuses et musculaires peuvent survenir. Il y a effectivement un traitement qui combine du phosphore et de la vitamine D mais il devra le prendre tout au long de sa vie pour que les effets soient durables. Il peut forcément y avoir un impact sur sa croissance. Sa courbe légèrement stagnante sur le carnet de santé suite à l’apprentissage de la marche en témoigne. Mais le médecin nous dit que dans son malheur, MiniLeg0 a la chance d’avoir des parents plutôt grands (1m71 et 1m80) ce qui devrait jouer en sa faveur. Pour l’activité physique, elle nous conseille des sports sans impacts violents dans un premier temps, comme la piscine.

Et puis vient notre dernière question : pourquoi ? Est-ce lié à la maladie que j’ai contracté durant ma grossesse ? A sa naissance prématurée ? Qu’ai-je encore fait de travers en tant que maman pour que le sort nous frappe à nouveau ?

Le médecin nous dit que la stéatose hépatique de la grossesse (1 cas sur 13.000 grossesses) et son rachitisme vitamino-résistant (1 cas sur 20.000 naissances) ne sont pas liés, sa naissance prématurée non plus. Quand j’entends ces mots, j’ai l’impression que la vie nous en veut pour je ne sais quelle raison.

Elle nous parle de maladie génétique et nous demande si nous serions prêts à faire des tests afin d’en savoir un peu plus et peut-être d’aider la recherche. Sans l’ombre d’un doute, nous acceptons bien évidemment. Forcément on se culpabilise, de savoir que c’est sans doute l’un de nous deux qui est la cause de cette maladie. Le médecin tente de nous rassurer et de nous déculpabiliser mais nous sommes parents, on ne peut s’en empêcher.

On repart le cœur gros en essayant de ne pas montrer à MiniLeg0 que nous sommes effondrés. L’ordonnance en poche, nous passons récupérer son traitement à la pharmacie. J’envoie un e-mail à nos familles pour les prévenir et ils nous envoient tout leur soutien en retour pour cette nouvelle épreuve.

La mise en place du traitement

Nous commençons le traitement au printemps 2016. MiniLeg0 a à peine 2 ans. Le matin, il doit prendre quelques gouttes de vitamine D. Je les mets dans une cuillère et il les prend sans aucun problème. Je fais la même chose pour le phosphore et là c’est le drame : MiniLeg0 refuse de le prendre. Je l’ai moi-même goûté pour comprendre pourquoi il n’en voulait pas et j’ai tout de suite compris : le goût est super amer, même moi j’ai du mal à l’avaler.

Je tente de le mettre dans son biberon, impossible. Je tente une cuillère de compote, impossible. Je tente une cuillère de yaourt au chocolat, impossible. J’ai finalement dû le forcer à avaler la cuillère de compote en lui expliquant que c’était pour son bien et que s’il ne le prenait pas, il serait malade et ne pourrait pas grandir. Bébé pleure. Maman pleure. Et il va falloir faire ça 3 fois par jour toute sa vie ? Je suis désespérée.

C’est stupide de ma part, mais à ce moment-là, je maudis un peu le laboratoire de ne pas avoir pensé à donner meilleur goût à ce médicament pris par des enfants. Je me rends compte aujourd’hui que c’est déjà bien d’avoir un médicament bien sûr.

Au fil du temps, on s’aperçoit que dans un fond de jus d’orange, ça passe. Pas vraiment comme une lettre à la poste, mais ça passe. J’ai reçu quelques commentaires culpabilisants de mon entourage sur le fait que, 3 fonds de jus d’orange par jour, c’était trop de sucre pour un enfant.

Un jour, la pharmacienne m’a demandé comment je faisais pour donner un médicament qui a si mauvais goût à un petit bout de 2 ans. Je lui ai répondu sans m’en rendre compte : « Je sais bien que ce n’est pas ce qu’il y a de mieux, mais on le met dans un fond de jus d’orange ». Et la dame m’a gentiment répondu : « Il vaut mieux 3 gouttes de jus d’orange plutôt qu’il ne le prenne pas du tout et qu’il ait des problèmes plus tard ». C’est bête mais ces mots résonnent encore en moi aujourd’hui comme un pansement qu’elle avait doucement posé sur mon cœur brisé de maman qui fait de son mieux.

Suite aux soucis rencontrés par MiniLeg0 lorsqu’il est rentré à l’école, nous avons demandé à la pédiatre si le traitement pouvait jouer sur ses humeurs. D’après elle, à ce jour, il n’y a pas de preuve qu’il y ait un lien entre ce traitement et des problèmes de comportement chez les enfants qui le prennent.

Le souci de la prise des médicaments réglé, viennent à présent les suivis. MiniLeg0 doit faire une prise de sang et un prélèvement d’urine tous les trimestres. Ceci afin de vérifier que le dosage du traitement est adapté et le revoir en fonction des résultats. Même s’il ne rechigne pas à aller au laboratoire ou à s’asseoir dans la chaise, encore aujourd’hui à presque 6 ans, la panique le gagne dès que la seringue approche. Maintenant il arrive quand même à souffler à travers ses pleurs, mais pour un petit bout de 2 ans, une piqûre tous les 3 mois, c’était une épreuve.

Une fois par an, MiniLeg0 fait aussi une échographie. En effet, la prise des médicaments, si le dosage n’est pas adapté, peut entraîner une calcification irréversible au niveau des reins. C’est toujours un moment très stressant pour nous en tant que parents. On ne lâche pas l’écran des yeux, même si on ne sait absolument pas à quoi peut bien ressembler une calcification des reins. Et on attend toujours avec impatience que le médecin nous dise ce qu’il a vu ou pas.

La génétique

Quelques semaines après la mise en route du traitement, nous rencontrons à nouveau la pédiatre, cette fois-ci accompagnée de la généticienne pour le bilan génétique. Elle nous annonce qu’aucun de nous n’ait responsable de la maladie de MiniLeg0. Il s’agit en fait d’une mutation génétique qui a eu lieu lors de son développement in utero – d’où le petit surnom de « X-men » trouvé par ma sœur.

Elle nous explique que MiniLeg0 pourrait transmettre sa maladie s’il a une fille car elle est sur le chromosome X. Je vous explique ça avec mes mots de maman donc veuillez m’excuser d’avance si mon explication est un peu brouillon.

En gros, si MiniLeg0 a une fille, elle aura 2 chromosomes X dont l’un sera porteur de la maladie. Le chromosome malade se mettra « en veille » et le chromosome sain prendra le relais. Si c’est un garçon, il ne sera pas malade car MiniLeg0 lui transmettrait un chromosome Y.

Durant ce bilan, on nous explique également que cette maladie peut jouer sur la fertilité de MiniLeg0. Des solutions seront envisageables à la puberté, mais nous n’en sommes pas encore là.

Mon fils, ce héros

Le dernier bilan de MiniLeg0 au CHU de Nantes a eu lieu en novembre dernier. Pour la première fois en 3 ans et demi depuis le début du traitement, le dosage de ses médicaments est parfait. Aucun signe de calcification au niveau de ses reins. Sa courbe de croissance monte progressivement. Et même s’il n’est pas dans le haut de la courbe, il grandit régulièrement. Ses jambes sont redevenues droites, à tel point que la pédiatre les a prises en photo pour un avant-après assez impressionnant.

Les douleurs persistent de temps à autres quand MiniLeg0 reste debout ou qu’il fait une activité physique trop longtemps. La MDPH lui a octroyé une carte « station debout pénible » afin qu’il puisse bénéficier d’une place assise ou d’une facilité d’accès si besoin.

Et la recherche avance. La pédiatre nous a dit qu’il existait un nouveau traitement, pour le moment réservé aux « cas extrême » car il est coûteux et nécessite une hospitalisation. Mais pour MiniLeg0 sur qui le traitement phosphore et vitamine D fonctionne bien, ce n’est pas nécessaire pour le moment. Pour autant, c’est rassurant de savoir que la recherche avance.

A bientôt 6 ans, mon petit X-men est responsabilisé sur sa maladie. Le PAI (projet d’accueil individualisé) est en place à l’école, au centre médico-psychologique et au centre de loisirs. Il sait dire s’il a eu ou non ses médicaments, et il sait pourquoi il doit les prendre.

Lors de notre visite chez Mickey à Noël dernier, il a adoré se faire mesurer à l’entrée des attractions car il pouvait pratiquement toutes les faire. Et quand les cast members lui annonçaient « Tu peux y aller, tu es assez grand » il répondait toujours fièrement « C’est parce que j’ai pris mon médicament ».

15 commentaires sur “Mon fils est un X-men

  1. Tellement touchant cet article. Et les mots de ton fils. C est époustouflant la force mental qu on les enfants et le recul nécessaire pour accepter la maladie et vivre au quotidien avec. Merci pour ce magnifique article

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      1. Bonsoir,

        Comme je suis émue par cet article. Mon cœur de maman comprend tellement ce que vous avez pu ressentir.

        Mes trois enfants sont atteint d’une hypothyroïdie congénitale (1 cas sur 4500 naissance). C’est une maladie qui est détectée par le biais du test de gutrie à la maternité. Nous avons été appelé aux 15 jours de notre premier afin de nous annoncé sa maladie. Le monde m’est tombé sur la tête, une maladie ??? Mon fils ?? Un traitement à vie ?? Des prises de sang tous les mois ?? Une scintigraphie ?? Échographie ?? Mais c’est un bébé, laissez-le..

        J’étais dévastée. Alors beaucoup me tomberont dessus pour me dire que ce n’est qu’une hypothyroïdie, mais chez les enfants ça joue principalement sur leur croissance. Et peu importe, une maladie est une maladie, et étendre mon fils hurler à chaque prise de sang c’était un crève cœur, à chaque fois…

        Je suis ensuite tombée enceinte de mes jumelles, la pédiatre de notre fils, endocrinologue, me rassure en me disant qu’il y a uniquement 30% de chance qu’une de mes jumelles l’ai également. À la naissance on nous annonce que les deux sont atteintes de cette même maladie. Mais pourquoi ??? Comment c’est possible ??? Personne sait nous l’expliquer, personne. Ça ne vient pas de nous, mais aucune raison nous a été donnée.

        Alors encore une fois c’est qu’une hypothyroïdie, mais des prises de sang tous les mois, des gouttes tous les matins. Et un suivis un peu plus particulier. C’est quelque chose…

        Mes filles ont maintenant 16 mois et mon grand 4 ans. Ils ont des prises de sang tous les trimestres. Mon grand n’a plus de traitement depuis ses 3 ans. Mais à chaque prise de sang je suis en panique et mon cœur se brise…

        La recherche n’évolue apparement pas sur leur maladie malheureusement. Les gouttes doivent être concervées au frigo donc jamais évident pour nos vacances…

        Bref je suis désolée ça ne vous intéressera sûrement pas mais je ne sais pas pourquoi ça m’a donné l’envie d’en parler car je sais ce que vous ressentez pour les prises de sang et les attentes de résultats. Je n’ai jamais eu de soutiens de nos proches car apparement je m’en fait trop, mais les personnes qui ne le vivent pas ne comprennent pas.

        Je ne connaissais pas la maladie de miniLego, cet article est si bien écrit. J’espère de tout mon cœur qu’il n’aura jamais à rester en souffrance. Il est si fort et si touchant. Et il a bien raison, c’est parce qu’il a pris ses médicaments mais surtout parce que c’est un super héros ❤️

        Laura
        Cinqalamaison_ sur Instagram.

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      2. Bonjour,

        Bien au contraire, je trouve que tu as eu totalement raison de laisser ton témoignage ici. Effectivement, on ne se rend pas compte tant qu’on ne l’a pas vécu, mais parfois les écrits aident à la compréhension. Des parents dans ta situation pourront se sentir moins seuls en lisant ton commentaires, et les parents qui ne le sont pas prendront peut-être conscience de la difficulté de la vie avec des enfants malades.

        Je connais aussi le coup du médicament au frigo pendant les vacances, c’est le cas aussi pour la vitamine D de MiniLeg0. C’est une organisation sans fin et des moments parfois douloureux. Mais au final, ils nous prouvent toujours qu’ils sont plus forts qu’on ne peut le penser.

        Je t’envoie beaucoup de courage dans ces épreuves et j’espère de tout cœur que la recherche évoluera pour vous aussi.

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  2. Votre histoire, l’histoire de mini lego est très touchante. Vous êtes de supers parents et ce petit bout d’homme en devenir est un winner.
    Avec votre aide et sa volonté il va pouvoir avancer à son rythme et malgré sa maladie avancer dans la vie aussi bien que possible.
    Je vous envoie tout mon courage et vous souhaite
    le meilleur. 😊😍

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  3. Un joli témoignage.. Plein d’humilité…

    Malheureusement la vie est belle mais peut s’avérer si cruelle aussi…

    Minileg0 peut-être fier de lui, un petit super héros du quotidien comme j’appelle si souvent mon fils également par ce surnom…

    Courage à vous !!

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  4. Bonjour,
    un texte qui résonne en moi … en effet je suis porteuse de cette maladie et je l’ai transmise à deux de mes enfants sur 4 . Je n’ai pas connu de garçon atteint de la maladie. Chez moi c’était ma mère puis 2 de mes sœurs et moi et il s’avère que mon petit dernier l’a… il n’a que 4 mois et demi et nous sommes sur le point d’accepter qu’il rentre dans l’essai clinique du nouveau traitement pour les enfants de moins de 1 an. Ma grand a déjà ce nouveau traitement depuis 18 mois, une révolution chez nous après une forme de maladie sévère des déformations importantes des opérations… j’habite dans le nord et consulte à Paris. Quand mon garçon commencera le traitement je vais devoir y aller 1 fois par semaine en hospitalisation de jour, pendant 2 mois. J’aimerais vraiment que ça fonctionne bien sur lui aussi 🤞🏼.

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  5. Bravo pour votre témoignage, vous pouvez être fière de mini Lego et de vous. Tout est mis en place pour que votre petit cœur grandisse dans de bonnes conditions et entouré d’amour. 🥰

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